À Villeurbanne, l’association Elle Cartonne transforme un déchet du quotidien en levier d’insertion et d’innovation sociale. Retour sur leur parcours d’accompagnement avec Alter’Incub et France Active, entre structuration, financement et ambition sociale.
En apparence, le carton est un objet banal, jetable, voire invisible dans nos usages quotidiens. Pour Elle Cartonne, il est devenu le cœur d’un projet environnemental et social porté avec énergie par Amandine Louis et Alexandra Champion. À Villeurbanne, les deux cofondatrices récupèrent des cartons usagés auprès d’entreprises locales pour leur offrir une seconde vie, tout en créant des opportunités d’insertion pour des femmes en situation de précarité.
Tout commence en 2023, lorsqu'Amandine, forte d'une expérience de quinze ans dans la logistique, constate le gaspillage systématique de cartons pourtant encore utilisables. Elle imagine alors un circuit de réemploi qui combinerait réduction des déchets et utilité sociale. Un an plus tard, Alexandra, issue du champ de l’insertion professionnelle, rejoint le projet. Leur rencontre marque un tournant : « Elle avait les compétences logistiques, moi celles de l’accompagnement. On s’est bien complétées. »
Une logistique réinventée au service des femmes
Rapidement, le projet prend de l’ampleur. L’association s’installe sur le site de BROSS’UP, une entreprise à but d’emploi à Villeurbanne, où les cartons sont collectés, triés, valorisés et revendus, en particulier sous forme de packs de déménagement. Une matelasseuse permet également de transformer les cartons abîmés en produits de calage, remplaçant ainsi le plastique bulle.
Mais au-delà de l’aspect environnemental, c’est bien l’insertion des femmes qui constitue le cœur du projet. Leur ambition est de devenir une structure d’insertion à part entière, spécialisée dans un secteur peu féminisé : la logistique. En attendant d’obtenir un conventionnement, Elle Cartonne propose des immersions professionnelles adaptées aux besoins de chacune. « On veut casser les stéréotypes genrés dans les métiers de l’insertion. Il n’existe pas de structure d’insertion dédiée uniquement aux femmes aujourd’hui. »

Un accompagnement structurant
Pour structurer leur modèle et sécuriser leur développement, les deux cofondatrices s’entourent. En incubation, elles ont travaillé à la fois sur leur gouvernance, leur vision commune, leur modèle économique et leurs projections budgétaires. « Alter’Incub nous a permis de clarifier nos orientations, de poser les bases de notre modèle économique, mais aussi de vérifier que nous avions une vision commune avec Amandine. On s’est sentie épaulées et nous avons pu répondre à des appels à projets », raconte Alexandra.
Cette dynamique d’accompagnement se poursuit naturellement avec France Active. Grâce à l'appui d'Estelle Rabiller, elles candidatent à la Place de l’Émergence, un dispositif de soutien dédié aux projets innovants en phase d’amorçage. « On ne pensait même pas y aller sans leur aval. Le travail de préparation nous a beaucoup aidées à formuler notre discours et à crédibiliser notre projet. » Résultat : un pitch convaincant et un soutien financier supérieur à leurs attentes. « On avait demandé 20 000 €, on a reçu 25 000 € » une première depuis la création du dispositif.
Cette subvention va permettre à l’association de lancer l’accueil des premières femmes en immersion d’ici la fin 2025, tout en poursuivant la structuration de son offre commerciale.
Une dynamique qui se poursuit
Après un an d’activité, Elle Cartonne continue de se structurer. Un déménagement est prévu à l’automne 2025 dans un nouveau local de 260 m², situé au sein d’un tiers-lieu à Villeurbanne. L’objectif : accueillir davantage de femmes sur les activités de collecte, de valorisation et de préparation des commandes. À l’horizon fin 2026, environ 25 parcours d’insertion devraient être proposés.
Au-delà des accompagnements reçus, Alexandra souligne l’intérêt de l’intégration dans des réseaux comme ceux d’Alter’Incub ou de France Active : « On est mises en lien avec d’autres porteurs, on échange sur nos problématiques, on bénéficie d’une veille collective. C’est un vrai soutien. »